> Voltaire, le vin et le blasphème ✎ Janie Beghin
Durant toute sa vie, Voltaire a été un amateur de bons vins ; dans sa correspondance, il avoue volontiers qu'il « aime à boire », mais attention, à sa table pas de bibine, seulement du nectar. Il fait venir à grands frais les meilleurs crus, et en vaste quantité, Tokay de Hongrie, vins charpentés de Bourgogne, ou encore moelleux breuvages d’origine ibérique. L'Aubergiste de l'Europe, assisté de sa nièce, savaient recevoir ! Et quand il écrit les vers suivants :
De ce vin frais l'écume pétillante
De nos Français est l'image brillante,
C’est bien sûr du divin champagne, synonyme de fête et d'oubli qu’il s’agit. Libiamo !
A Ferney, en terre calviniste, il va même jusqu’à planter quelques pieds de vigne, une variation sur le plaisir et la nécessité de cultiver son jardin. Las, il semblerait que le vignoble donne des grappes de meilleure qualité en pays catholiques, ces pays du Soleil où toutefois fleurissaient en son temps de bien sombres superstitions.
Aussi le grand contempteur de ces dernières n’aura pas assez de mots durs et triviaux pour dire tout le mal qu’il pense de l’une d’entre elles : le mystère de la transsubstantiation (ou vin changé en sang). Une « croyance monstrueuse », aux yeux des protestants, prétend-il, dans le « Dictionnaire philosophique » (1764), et dont voici un extrait : « Leur horreur augmente, quand on leur dit qu’on voit tous les jours, dans les pays catholiques, des prêtres, des moines qui, sortant d’un lit incestueux, et n’ayant pas encore lavé leurs mains souillées d’impuretés, vont faire des dieux par centaines, mangent et boivent leur dieu, chient et pissent leur dieu.»
Vlan, nous revoilà en pleine actualité, Charlie, les blasphèmes et tout ce qui s’en suit.
Janie, le 16 /02/2021